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Dialectiques aujourd’hui

Daniel Bensaïd, Wolfgang Fritz Haug, Bertell Ollman,Lucien Sève, Christopher Arthur, Roberto Finelli, Isabelle Garo, Michael Krätke, Jacques Bidet, Wolfgang Fritz Haug, Jean-Louis Lippert, Bertell Ollman, Eftichios Bitsakis, Gilles Cohen-Tannoudji, Janine Guespin-Michel, Arnaud Spire, Daniel Bensaïd, Roger Martelli, Yvon Quiniou, Michael-Matsas Savas.

Ref.: EM/Syllepse_2
Disponibilité: Disponible Hors stock
Prix promo 17,00 € Prix normal 17,00 €

Ce livre est né d’une rencontre. Rencontre personnelle entre deux philosophes très attachés à la pensée marxienne, Bertell Ollman, professeur à l’Université de New York, et Lucien Sève, chercheur parisien extra-universitaire - d’où est née une amitié. Et rencontre intellectuelle sur un constat commun de haute importance, à leurs yeux valable pour leurs deux pays : la dialectique n’a aujourd’hui ni l’audience qu’elle mérite, ni le développement qu’elle appelle. De cette insatisfaction partagée est né un projet, avancé par Bertell Ollman : organiser à Paris un colloque international sur le thème de la dialectique aujourd’hui. Projet mis à exécution grâce à l’active mobilisation des responsables d’Espaces Marx, à commencer par sa secrétaire générale Elisabeth Gauthier, sur l’invitation de qui se sont rassemblés les 30 septembre et 1er octobre 2005 une quinzaine d’intervenants en provenance de France, des Etats-Unis, d’Allemagne, d’Italie, de Grèce, de Hongrie, et de nombreux participants parmi lesquels se remarquaient plusieurs dizaines d’étudiants et jeunes chercheurs. La richesse et le niveau des contributions à ces journées, sur un thème qu’on ne saurait dire aujourd’hui rebattu dans l’aire francophone, en ont fait une manière d’événement. On a pu mesurer combien à l’échelle internationale, chez ceux et celles que continue d’occuper au plus haut point la résolution de transformer le monde, le vaste ensemble d’acquis irréversibles et de problèmes ouverts que recouvre le mot dialectique constitue un champ pertinent de réflexions et de recherches, en des sens dont ce colloque a permis de percevoir la diversité. Marx nous a-t-il laissé la « logique du Capital », comme disait Lénine, et en quoi alors consiste-t-elle, ou plutôt la leçon de son progressif éloignement de la dialectique hégélienne, et jusqu’à quel point faudrait-il aller en ce sens ? Se référer à la dialectique, est-ce user positivement d’un corpus logique et méthodologique en devenir, ou n’est-il vraie dialectique que négative, dans le constant révolutionnement des savoirs et des pouvoirs ? Si l’idée de dialectique de la nature est toujours bel et bien valide, est-ce à la façon même que définissait en son temps Engels, ou d’une manière qui appelle reconsidérations et réélaborations majeures ? Envisagée selon son essentielle dimension pratique, la dialectique a-t-elle à nous proposer une pérenne « algèbre de la révolution », ou l’inspiration pour repenser à neuf un dépassement du capitalisme plus que jamais nécessaire ? De quoi mesurer combien la culture dialectique est essentielle à notre temps. De l’avis général, la réussite de ce colloque appelait des prolongements. Le premier d’entre eux est la présente publication. On y reprend les contributions des intervenants annoncés, mais sous une forme le plus souvent retravaillée par eux, en y ajoutant celles, non prononcées, de plusieurs participants. On conserve la ventilation en thèmes du colloque devenus ici autant de chapitres au sein desquels l’ordre inédit des textes est celui du classement alphabétique des auteurs. Au total, pensons-nous, ce livre est sensiblement plus et autre chose qu’un simple volume d’actes de colloque : une approche à multiples voix d’une des questions théoriques et stratégiques les plus déterminantes en profondeur pour l’intelligence de notre présent et l’orientation de notre futur. Dans l’esprit des auteurs comme d’Espaces Marx, cette publication est bien plutôt apéritive que conclusive. La réflexion est ouverte sur les suites qu’il serait judicieux de donner à l’événement qu’elle concrétise : les suggestions des lecteurs à ce sujet seront les bienvenues. Espaces Marx informera largement des initiatives nouvelles qui viendront à être prises en ce sens. Il y a tout juste cent cinquante ans, dans une allocution pour le jubilé du journal ouvrier anglais The People’s Paper, Marx parlait de la dialectique en des termes qui trouvent aujourd’hui en nous un singulier écho. « A notre époque, disait-il, chaque chose semble grosse de son propre contraire. Nous voyons les machines, qui possèdent la force merveilleuse de réduire et de rendre plus fécond le travail humain, en faire une chose rabougrie qu’elles consument jusqu’à épuisement. Par un étrange maléfice, les nouvelles sources de richesse se transforment en autant de sources de misère. On dirait que les conquêtes de la science doivent être payées du renoncement à tout ce qui a du caractère. Même la pure lumière de la science ne peut apparemment briller que sur le sombre fond de l’ignorance. » Face à cet antagonisme en vertu duquel « le progrès de l’industrie ne peut parvenir à son accomplissement sans s’accompagner d’une régression tout aussi spectaculaire en politique », ce dont certains croient devoir conclure qu’il faudrait renoncer aux progrès techniques pour échapper aux conflits modernes, il appelait très dialectiquement ses auditeurs à ne pas se « méprendre sur la figure de cet esprit malin sans cesse à l’œuvre dans toutes ces contradictions. Nous savons que les forces nouvelles de la société, pour devenir véritablement agissantes, ont besoin d’une seule chose : que des hommes nouveaux s’en rendent maîtres - et ces hommes, concluait-il, ce sont les ouvriers. » C’est bien de nous que parle cette dialectique-là. Travaillons davantage à lui donner la parole.